C'est en lisant "Eric" hier soir que m'est venu à l'esprit l'envie de raconter mon histoire au sujet de mon Eric, si je peux me permettre de prendre un caractère possessif à cette phrase. Cela se passe en 1971, j'étais encore gamin puisque j'avais 10a. J'ai fait la connaissance en classe d'un copain, avec qui, j'avais quelques affinités. Mon frère avait son frère comme copain, et dans les écoles communales, difficile de "faire autrement"... peu d'élèves à cette époque dans le village, d'où, peu d'amis... Mes parents ont acheté un terrain, où une vieille batisse devait être démolie afin d'y construire notre maison. Le jour de la démolition, mon copain, qui se trouvait être le fils de l'ancien propriétaire, était venu avec son cousin "germain" du même âge : Eric ! Nous avons fait connaissance, puis vraiment sympathiser pour devenir très vite, des complices... A cet âge, on ne pense pas à grand chose qu'aux jeux de notre âge.. mais les années passant, nous nous sommes de plus en plus rapprochés, moi de lui et lui de moi. Nous avions les mêmes idées, les mêmes centres d'intérêt, les mêmes envies... et quand vient le moment des premières sensations, c'est avec Eric que cela s'est passé... Nos premières "branlettes, jusqu'à nos premiers 69, nos premières sodo. Nous étions nos premiers "amants". Notre vie de "copains-amants" s'est poursuivie pendant quatre ans, jusqu'à la période où à 15ans, je suis parti en école militaire à 400 kilomètres de la maison. Je ne revenais en "permission" et en uniforme, que pour les congés scolaires, parfois trop peu de temps, mais toujours pour lui. C'était toujours un réel plaisir de me rendre chez lui, où, bien sûr, nous nous retrouvions pour ... Puis, le temps a passé, j'ai eu peur de moi, peur des autres, du qu'en dira t-on, je me suis donc marié, sans jamais n'avoir dragué une nana, j'ai convolé en "justes noces" et j'a eu des enfants. Eric est parti à Paris où il a vécu sa vie, j'ai vécu la mienne, d'affectation en affectation avec toujours son image en ma mémoire. En 1987, de retour de polynésie française, et affecté dans sa région, je suis passé chez lui, histoire de présenter à sa famille celle qui était devenue Madame... et mes enfants. Eric était là, en congé, et nous nous sommes revus. Il s'est passé quelque chose, un je ne sais quoi, un regard, une complicité d'avant, bref un éclair qui fait que rien n'avait changé. J'avais les larmes aux yeux, il l'a remarqué. Nous n'avons pas trop flané, et nous sommes repartis. Eric était superbe, encore plus à mon goût que ce petit mec de 17 ans que j'avais dans mes pensées. Il en avait 26, tout comme moi, et c'était bien différent.
Travaillant de nuit, ma femme en stage dans la journée, je passais mes matinées à rechercher ses coordonnées dans le Minitel, sans jamais les trouver. J'ai réussi à les avoir par sa soeur, et j'ai donc appelé. Eric m'a parlé une fois, mais il était pressé. Il vivait chez sa tante à Paris, enfin, dans le même immeuble.
Un soir j'ai essayé de le joindre, mais c'est sa tante qui m'a répondu qu'Eric n'était pas bien du tout depuis son retour de vacances chez son père. Qu'il était très déprimé. Il ne voulait parler à personne. Les choses sont alors allées très vite. J'ai rappelé, une fois, deux fois, plus encore, mais rien, jusqu'au jour où sa tante m'a appris qu'Eric s'est donné la mort en se suicidant par pendaison le jour même; sans laisser d'explication, sans rien dire. J'ai perdu une partie de moi, une partie de ma vie, de mon enfance. J'ai eu toutes les suppositions, pourquoi, pour qui ?
Les semaines, les mois, les années ont passé, et ...chasser le naturel il revient au galop... j'ai rencontré un autre homme. Ma femme était en vacances pour trois mois dans sa famille, outre mer. A son retour, pour ne pas vivre, ou revivre, ce que j'avais déjà vécu, j'ai avoué ma relation "forte". Le divorce, grand mot, mais mot béni, m'a été giflé en pleine poire. J'allais divorcer! Enfin! l'entente n'y était pas depuis toujours, les enfants ne supportaient pas ses humeurs et nos rapports tendus... il fallait prendre le taureau par les cornes et dire enfin "qui je suis". Oui je suis homo et depuis toujours et très fier de l'être. J'ai fait alors mon "coming-out" à ma famille, proche et moins proche, amis, collègues de bureau jusqu'à toute l'entreprise, tout le monde devait savoir que ce "bon père de famille" en avait assez de vivre caché ! j'avais rencontré un homme que j'aimais plus que tout, je serai presque même prêt à dire, "plus qu'Eric " et là, je ne voulais pas le perdre. Certes mon "homme" est séro, ça n'arrange pas la vie de couple, mais quand on s'aime, on est prêt à tout. Alors, mes enfants heureux de me savoir enfin heureux, je partais confiant vivre chez lui où je suis depuis plus de deux ans. Mes enfants, par décision de justice, viennent me voir comme tout père, un week end sur deux, et la vie reprend...
Mais il restait au fond de moi une terrible pensée au sujet d'Eric. Pourquoi ce suicide? J'ai donc un jour appelé sa soeur, avec qui j'ai parlé... lui ai annoncé ma nouvelle vie. Nous avons bien sûr parlé d'Eric. En fait, j'ai donc appris qu'Eric avait semble t - il tout prévu depuis longue date. Son choix était déjà fait... mûrement réfléchi. Il se trouve que je suis passé là, le jour où il y était, mais rien à voir avec moi, ce qui quelque part m'a rendu un peu de réconfort. Eric était séro, lui aussi, et, travaillant dans le milieu hospitalier, il ne pouvait plus se permettre de rester en contact avec "ses" malades. Seul depuis peu dans la vie, il avait décidé d'en finir, mais ill avait confié à sa soeur qu'il avait été heureux de me revoir. Ça n'a rien changé pour lui, il avait décidé... Je ne pense pas, le connaissant, que si j'avais été célibataire, il aurait continué sa vie. Mais je me dis qu'au travers de ma nouvelle vie, de la vie avec mon homme, séro aussi, c'est un peu lui qui vit auprès de moi ! Voilà donc une pensée pour mon Eric, décédé deux semaines avant mon fils, en avril 88. A Eric.... je t'aime !
Oui en effet quelle emotion en lisant to histoire ,qui nest pas sans rappeller la mienne ,j'ai été tres emu et les larmes me sont venues aux yeux en te lisant, quel courage tu as eu moi j'ai vecu presque la meme chose mais suis toujours marié !!bye