Dans ta lettre, tu me parlais de "Get real" et "The talented Mister Ripley" (à ajouter à la liste non exhaustive: The wedding banquet (Garçon d'honneur); Maurice; Priest; Threesome (Deux garçons une fille, trois possibilités); Les roseaux sauvages; Carrigton; Philadelphia; Peter's friend; Beautiful thing; Love! Valour! Compassion! ; Fraise et chocolat; Stonewall; Juste une question d'amour; Priscilla Queen of the desert; Wilde; Félix; Gohato; Presque rien).
J'ai bien aimé le premier mais pas au point d'aller le voir plusieurs fois. Tout comme toi, je trouve qu'il aurait sa place dans nos écoles. Je suis d'ailleurs choqué qu'il soit enfants non-admis. Ce n'est pas un film qui va faire pencher tes sentiments amoureux d'un côté ou de l'autre. C'est un sujet délicat, je dois l'admettre. Je n'aurais vraiment pas été à l'aise dans un débat sur ce film devant mes petits camarades de classe. Je me souviens de quelques professeurs ayant émis des remarques sur le sujet, en voici une illustration: "de toute façon il ne faut pas vous inquiéter, les pédés, ils sont toujours entourés de beaucoup de filles mais ils ne touchent pas beaucoup" dixit un prof de français pour rassurer les fiers jeunes étalons de la classe. Je m'étais quelque peu senti visé car j'étais toujours bien entouré et en effet, je ne touchais pas beaucoup. Le prof a sorti ça sans nous connaître. C'était la première fois que nous l'avions (en quatrième secondaire, 15-16 ans). Heureusement ? je ne sais pas pourquoi je dis heureusement, aurais-je été rejeté ? Certainement pas par les filles mais peut-être par ces imbéciles de garçons immatures ? personne n'a fait remarqué au prof qu'il y avait un garçon particulièrement bien entouré dans la classe. La remarque s'avérait être exacte car j'étais amoureux d'un garçon de la classe (pendant toute la durée de mes secondaires et je ne l'ai pas effacé de ma mémoire) ce qui laisse à penser que j'étais bien "pédé" (ah quel joli mot, je ne m'en lasse pas). Il ne lui était pas rare de me faire violence morale au vestiaire de gym où ailleurs en me faisant des propositions indécentes, bien haut pour que tout le monde entende le jeune coq. J'avais envie d'accepter bien sûr mais je savais que ce n'était que de la provocation. Il aurait probablement été abasourdi que je accepte sans aucune gêne, devant les autres. Lui aurait alors été mal à l'aise s'il voyait qu'il avait visé juste et que j'étais sincère dans l'acceptation. Cela aurait jeté un froid entre nous et sa réaction aurait certainement été violante. (J'ai appris par la suite que durant ses études universitaires, il avait hébergé un copain dans sa chambre. Durant son sommeil, ce copain a entrepris des attouchements qui l'ont réveillé. Il serait parti à grand fracas, dégoûté. Il préféra aller passer la nuit chez son père plutôt que de revenir et peut-être se retrouver face à cet infâme personnage. Il a mis un certain temps avant de revoir ce copain et de lui "pardonner"). Il faut admettre qu'il était "assez sexe", toutes les filles (et moi) étaient à ses pieds. Je me souviens d'une fois où nous étions trois à attendre devant l'auditoire de chimie. J'étais là à faire le pied de grue à quelques mettre de Christian et Sabine qui flirtaient avant le cours. Mathieu est arrivé avec sa démarche nonchalante et à feint de vouloir m'embrasser pour que nous formions un couple comme les deux autres. Il m'a happé de ses bras musclés et a arrêté son visage à quelques millimètres du mien et puis a relâché son étreinte en riant fortement. J'avais mon coeur qui battait la chamade, une boule sensorielle venait d'éclater en ma poitrine. J'en serais presque tombé à la renverse. Il m'aurait suffit de tendre les lèvres... Arrête là vieux, ça t'aurait certainement valu un bon coup de poing (j'allais dire une baffe mais non ça c'est moi et pas lui sauf si c'est destiné à une fille. Il en a un jour donné une à Sophie après qu'elle ait osé défier la force du mâle en lui jetant un verre d'eau à la figure). Je m'écarte quelque peu des commentaires de films. Excuse-moi, je cesse de t'importuner avec mes histoires et j'y reviens. Il est maintenant temps de parler de Mr Ripley. En sortant du film, je ne savais pas trop quoi en penser. Avec le recul, je dirais qu'il m'a plu mis à part la fin que j'aurais tant préférée heureuse. J'ai particulièrement apprécié la qualité des regards lorsqu'il rencontre et bouscule son futur amant à l'Opéra en compagnie de la fiancée de Dickie.
As-tu lu "La confusion des sentiments" de Stefan Zweig ? J'ai bien sûr lu "Dorian Gray" (dont tu me parlais dans ta précédente lettre) et également "Wide & Wisdom of Oscar Wilde". J'ai vu le film éponyme lorsque j'étudiais en Angleterre. Je suis allé le voir trois fois. Stephen Fry est un acteur extraordinaire (gay aussi, son autobiographie ? "Moab is my washpot" ? est très agréable à lire) et Jude Law est excellent aussi (de plus pas déplaisant à regarder mais pas gay dans la vie a contrario du film). Je suppose que ton ami Bernard a déjà vu "Maurice" puisqu'il aime voir tous les films abordant de près ou de loin l'homosexualité. J'adore les films très British de James Ivory (Howard's end, The remains of the day...). "Maurice", histoire d'amour platonique entre deux étudiants au Trinity College (Cambridge)... La scène de la promenade en "barque" sur les canaux entre les "Colleges" m'a rappelé mon passage dans cette ville délicieuse en juillet 1993. J'avais loué les services d'un étudiant (très bel homme ce qui n'était pas pour me déplaire) pour mener la barque et me conter l'histoire de la ville et son architecture lors d'une ballade sur les canaux.
Je t'ai déjà parlé de Philippe (le petit-ami de Marie en rhéto). Je l'avais invité à dîner lors de ma petite soirée "anciens" mais il n'avait pas pu venir. Il avait téléphoné pour dire qu'il était avec nous et avait fait un petit brin de causette avec Marie. Marie était ensuite entrée en contact avec lui par e-mail et elle lui avait fait part de mon attirance pour les hommes plutôt que pour les femmes. Il lui a renvoyé un mail nous invitant à aller dîner chez lui. J'en fut très heureux. Il a toujours eu un parlé très direct. Telle fut donc sa façon d'aborder le sujet. Je lui ai répondu "le coeur à découvert" (Titre d'un très beau roman de Michel Tremblay, je ne sais plus comment son nom s'écrit). Après le dîner, il nous a proposé d'aller tous les trois dans un bar gay de Bruxelles. Comment ai-je vécu cette expérience. J'avais peur avant d'y entrer. J'ai dû m'y reprendre à deux fois. La première fois, l'accès me semblait trop difficile et j'ai rebroussé chemin. (Les gens étaient excités par le strip en cours, il était "impossible" d'ouvrir la porte ni même de se frayer un passage). Les encouragements de Philippe et de Marie ont eu raison de mes appréhensions (Regi a suivi ses amis téméraires vers le comptoir de ce bar étriqué!!). Après quelques minutes, je me suis vite aperçu que je n'avais aucune raison d'être anxieux. Je n'étais pas mal à l'aise. Sans doute étais-je un peu coincé. J'ai regardé le spectacle mais mes yeux se sont bien gardés de faire un tour détaillé du propriétaire (Ils ont quand même repairé un, voire deux individus sans pour autant oser s'attarder). Je ne suis pas un fan des shows de travestis. Je ne suis jamais plus retourné dans ce bar. J'aurais préféré un lieu plus vaste, comportant plusieurs salles. L'une où les corps s'exprimeraient au rythme de la musique et l'autre, à l'ambiance sonore plus calme, où les esprits se perdraient dans la logorrhée. Quelque soit le lieu, il faut aller vers les autres, leur adresser la parole, nous ouvrir à l'inconnu. Peut-être y perdrons-nous quelques plumes, peut-être déploierons-nous de nouvelles ailes ?
Comme toujours, tu excuseras la lourdeur, le maniérisme et la préciosité de mes écrits!
plaisir de lire un texte qui est plus littéraire que pornographique, reflète des émotions vraisemblablement vécues, en tous cas reflet d'une réalité courante quotidienne montrant l'inconfortabilité homosexuelle. L'adolescence est une période à problème (car de transition). Le jeune homo est condamné à une sorte de 2de naissance, et cette fois ni sage-femme, ni infirmières, pas meme sa mère autour de lui, sauf rares exceptions. Ce texte donne le ton de cette difficulté, laisse deviner la souffrance,
l'angoisse quotidienne.
Pour moi fond excellent, forme à améliorer.
Enchanté de voir que des homos sont capables de se livrer sans bcp d'hésitations.
Cette lettre qui me permet quelque peu de te connaitre Regi m'a fait bcp plaisir.
Je ne m'attarderai pas sur les titres que tu décris n'ayant pas tout vu à part "Maurice".
Pour ce qui est de ton histoire avec un copain de classe en secondaire, j'emet un ptit avis qui, biensur, n'est que le mien. Personnellement ayant vécu ce genre de situation, je puis dire que ce copain avait, même si les apparences sont trompeuses, une attirance pour les mecs. Savait-il que tu étais homo ? Si c non, pourquoi faisait-il ca avec toi ?
Tout cela n'est que supposition mais penses-y ca peut-être drôle.